En marge du Forum mondial sur la nicotine (GFN) tenu le 11 juin 2020, une conférence en ligne a été organisée le 23 juin 2020, dans le but de discuter des alternatives de réduction des risques liés au tabagisme se basant sur les dernières évidences et les nombreuses revues de la littérature scientifique échangées lors du GFN plus tôt ce mois.
Le point de départ commun pour tous ces experts c’est qu’aujourd'hui, plus d'un milliard de personnes fument dans le monde et l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) prévoit que ce nombre ne diminuera pas avant 2025. On s’accorde à dire que les outils actuels pour la prévention et le sevrage tabagique s’avèrent largement insuffisants, inefficaces, et même inexistants pour certains.
Entre-temps, des progrès conséquents sont réalisés en matière d'alternatives pouvant réduire drastiquement les méfaits de la cigarette, et ce malgré des positions constamment conflictuelles, principalement entre l'industrie du tabac, les décideurs et les consommateurs.
L'année dernière, un certain nombre d'études scientifiques a révélé que les alternatives au tabac traditionnel génèrent moins de nocivité que les cigarettes conventionnelles. En conséquence, des millions de fumeurs se sont déjà convertis à ces alternatives, les plus connues étant la cigarette électronique, le tabac chauffé ou encore le Snus – très populaire en Suède notamment-.
Récemment en période de Covid, l'agence gouvernementale du Royaume-Uni, Public Health England, a publié un nouveau rapport rappelant que l'usage de la cigarette électronique est fortement recommandé pour les fumeurs étant donné la réduction moyenne de toxicité de 95% comparé à la cigarette.
Pour le Professeur Reuven Zimlichman, la situation est complexe et doit être vue à travers le comportement des fumeurs : "Les comportements malsains sont inévitables. Les gens font de mauvais choix de style de vie malgré des effets négatifs sur la santé. Les patients atteints de maladies cardiaques continuent de mener une vie sédentaire et de suivre un régime malsain, les patients diabétiques continuent de trop manger et de manger des aliments malsains, et les patients atteints de maladie pulmonaire obstructive chronique continuent de fumer. "
Pour lui, il est important de s'adapter à ces habitudes contradictoires : "Il y a eu une baisse significative de la mortalité cardiovasculaire dans les pays développés dans les années 90 et au début des années 2000. Nous avons vu beaucoup de campagnes éduquant les populations à adopter un mode de vie sain, à faire de l'exercice, bien manger, arrêter de boire et arrêter de fumer. L’objectif est de réduire les risques et minimiser les méfaits résultant de ces comportements inadéquats. Cette stratégie est appliquée avec beaucoup de succès dans de nombreux domaines tels que l’alimentation, l’exposition au soleil et bronzage, activités physiques, réduction de consommation de sucre. Quant au tabagisme, des études ont montré que le passage des cigarettes combustibles aux cigarettes électroniques permet à l'artère de se dilater considérablement mieux et de fournir ainsi beaucoup plus de sang aux organes ".
Le panel d'experts est unanime sur ce sujet : le point de départ fondamental c’est de garantir l’accès à l'information à la population, plus particulièrement aux fumeurs qui n’arrivent pas à arrêter de fumer : ces personnes ont le droit de savoir, le droit d’avoir accès à ces alternatives, la décision finale de les adopter ou pas leur revient.
Le Pr Zimlichman a notamment focalisé sur ce point : "Le plus important est l'approche des gouvernements. Ils devraient prendre des décisions compatibles avec l'approche médicale. Cela aidera à expliquer aux populations comment elles peuvent réduire leurs risques de contracter des maladies en changeant vers d’autres produits si elles ne peuvent pas arrêter de fumer. Il a aussi insisté sur le droit éthique à l’information et de la nécessité de permettre aux patients de décider quant au meilleur moyen les aider à arrêter de fumer."
Une approche pragmatique basée sur la science
Pour sa part, le Dr Peter Harper (oncologue et consultant en réduction des risques) une approche pragmatique et scientifique de la réduction des risques a été fortement recommandée pour minimiser les méfaits de la cigarette : e
« Nous savons que les fumeurs fument tout en étant conscients des risques pour leur santé. Ce que nous pensons être moins nocif est en fait plus restreint. Les cigarettes sont légalement vendues en Australie par exemple et les cigarettes électroniques sont interdites, ou du moins vendues sur ordonnance. Nous devrions être en mesure de différencier entre la fumée et les produits sans fumée. Les réglementations doivent être proportionnelles au risque, être justes et équitables. Nous devons protéger les jeunes et concentrer le marketing et la disponibilité de l’information sur les fumeurs adultes. Il est également important de contrôler les ingrédients et les saveurs sur la base de la science et des preuves. "
Quant à la position de l’OMS au sujet de la réduction des risques, nous avons posé cette question au Dr Peter Harper HArper
Med.tn :
À la lumière de plusieurs articles parus récemment à l’échelle globale, de résultats d'études et de déclarations sur la réduction des méfaits du tabac et des nouvelles alternatives sans fumée, nous pouvons clairement distinguer qu'au-delà du débat, il y a littéralement un bras de fer entre science et technocratie d’un côté, et idéologie, dogme et politisation de l’OMS de l’autre. Qu’en pensez-vous ?
Prof. Peter Harper : L’OMS refuse constamment de se fier aux données scientifiques, et nous ne pouvons pas attendre encore 25 ans pour que l’OMS vérifie toutes ces données scientifiques qui sont aujourd’hui évidentes, prouvées et avérées.